Polynôme de Zernike

La surface idéale d’un front d’onde plan qui est passé au travers d’un instrument convergent est une sphère centrée sur le point focal.  L’instrument transforme donc le front d’onde plan en front d’onde sphérique de rayon égale à la focale de l’optique.

Front d'onde plan à travers une optique convergente

A cause des aberrations, la surface réelle n’est pas une sphère parfaite, et il a donc fallu trouver une méthode pour mettre en équation cette surface afin de pouvoir analyser les écarts qu’elle présente par rapport à la sphère idéale.

Ludwig Seidel avait déjà bâti un modèle basé sur une série pour modéliser une surface de front d’onde. Néanmoins son modèle ne « collait » pas avec les aberrations les plus courantes et représenter une aberration simple demandait un développement complet des séries.

Fritz Zernike a créé un nouveau modèle basé sur le développement d’un polynôme qui lui prend en compte les principales aberrations optiques et leur affecte des termes spécifiques. Il est donc possible de modéliser une surface d’onde circulaire qui est issue d’un interféromètre ou d’un analyseur de front d’onde et de la décomposer une série de polynômes correspondant chacun à une aberration élémentaire.

Attention : La surface qui est modélisée est celle des différences du résultat réel qui provient de l’instrument par rapport à la sphère idéal. La surface d’un résultat parfait est donc un plan, pas une sphère.

Le polynôme est la somme d’un nombre infini de termes. Pour des raisons évidentes, le nombre de termes calculés sera un développement limité. La limite du développement est variable selon le champ d’application et les définitions, entre 22 et 41 pour l’optique. En optique, la formulation de Wyant est couramment utilisée. Chaque terme, et c’est l’intérêt de ce polynôme, correspond à un type d’aberration que l’on rencontre couramment en optique. Les termes, en fonction de la puissance qui leur est associée, ont un ordre. On trouve donc des termes de premier, second, troisième ordre, etc … Chaque famille d’aberration va avoir un terme pour les différents ordres. Par exemple l’aberration de sphéricité aura un terme de troisième ordre, cinquième ordre, septième ordre… En pratique, plus l’ordre est élevé et moins il a d’importance puisqu’il sert à affiner la forme de la courbe. En effet, plus il est élevée et plus il est complexe.

Voici les premiers termes du polynôme de Zernike avec les coefficients associés:

Z(r,θ) = Z0 + Z1 r cosθ+ Z2 r sinθ + Z3(2r2-1) + Z4(r2cos2θ) + Z5(r2sin2θ) + Z6((3r2-2)rcosθ) + Z7((3r2-2)r sinθ) +Z8(6r4-6r2+1) + Z9(r3 cos3θ) + Z10 (r3 sin3θ) …

r représente la distance à l’axe optique, et les différents Zn sont les coefficients de Zernike qui pondèrent chacun des termes. L’ensemble est en coordonnées polaires dans le système (r,θ) qui est parfaitement adapté à une pupille circulaire.

Voici par exemple les trois premiers termes de l’aberration de sphéricité. Le graphique représente l’écart entre le front d’onde parfait et le front d’onde observé.

 

Aberration de sphéricité de 3eme ordre

 

Aberration de sphéricité de 5eme ordre

 

Aberration de sphéricité de 7eme ordre

L’addition de tous les ordres pour cette aberration permet d’avoir la courbe qui colle le mieux au vrai profil de l’aberration.

A chaque terme sont associés deux coefficients qui pondèrent ce terme pour permettre de représenter une surface. Le fait d’avoir deux coefficients permet de représenter les aberrations sur deux axes à 45° ou 90° selon les aberrations. Certains termes, qui sont des surfaces de révolution, n’ont qu’un seul terme. C’est le cas de l’aberration sphérique ou du focus.

La somme de tous les termes donne la surface globale. L’intérêt majeur de ce modèle est de pouvoir ainsi préciser le rôle de chaque aberration dans le front d’onde qui sort de l’instrument. Il est donc possible de visualiser, une par une, les différentes aberrations qui altère le front d’onde. Il faut noter que les quatre premiers termes, qui sont les termes du premier ordre, ne sont pas des aberrations, mais des caractéristiques de positionnement de la surface.

Ainsi les premiers termes du polynôme sont les suivants :

  • Z0 : Le piston. Ce terme n’est pas une aberration, il représente simplement un décalage en hauteur  par rapport à la référence. Il n’a pas d’intérêt en métrologie.
  • Z1 et Z2 : Les tilts. Ce sont des termes d’ajustement aussi qui représentent un désaxage. Les tilts sont très utilisés en interférométrie pour jouer sur le nombre des frange d’interférence. Mais ils ne sont pas le résultat d’une aberration et ne sont donc pas pris en compte pour le résultat.

Tilt sur un axe

  • Z3 : La focalisation. Ce n’est pas une aberration. L’effet d’une défocalisation fait que l’image se forme en aval ou en amont de la position considérée. La plupart des méthodes de métrologie optique se pratique près du foyer, mais pas forcément exactement au foyer.

 

Défocalisation

  • Z4 et Z5 : Nous attaquons les termes du troisième ordre qui sont maintenant des aberrations. Les termes du troisième ordre sont historiquement les termes qui s’appliquent aux verres ophtalmiques. Les deux premiers sont l’astigmatisme avec sa forme caractéristique en selle de cheval. Comme nous le voyons, les deux axes sont décalés de 45°.

Astigmatisme sur les deux axes

 

  • Z6 et Z7 : C’est la coma avec deux axes à 90°

Coma

  • Z8 : La dernière aberration du troisième ordre est l’aberration de sphéricité.

 

Aberration de sphéricité

  • Z9 et Z10 : Nous arrivons aux aberrations de cinquième ordre comme le tréfoil

 

Tréfoil

Les ordres supérieurs sont donc les occurrences des aberrations précédentes comme nous l’avons vu. Certains développements comportent des variantes avec des quadratiques et des pentafoil.

Liste des 24 premiers termes du polynôme de Zernike

Le polynôme permet donc de mettre en équation une surface de front d’onde. Il a néanmoins ses limites. Des accidents trop importants ou trop irréguliers sur l’optique, mais aussi le résultat d’une turbulence pour un test sur une étoile, d’un déplacement d’air sur le banc de test ou bien d’une interférence (speckle) ou d’un artefact dus par exemple à une poussière ne pourront pas être pris en compte, ou fausseront de manière importante le polynôme.