Les interféromètres de Michelson et de Bath

Un interféromètre de mesure repose toujours sur le même principe : faire interférer une onde considérée comme parfaite – ou du moins parfaitement connue – avec une onde issue de l’optique à mesurer. L’interféromètre de Fizeau adopte pour cela un profil en ligne puisque les optiques de référence et de test sont sur le même axe. Il est tout à fait possible de décaler et séparer les axes de mesure et de référence.

C’est ce qu’à fait Michelson en 1878 pour mesurer la vitesse de la lumière avec l’interféromètre qui porte son nom.

Note : En interférométrie il est courant de dénommer les axes de l’interféromètre les « bras ».

L’interféromètre de Michelson est proche du Fizeau, mais avec une double utilisation du cube séparateur.

La logique est la même que celle de l’interféromètre de Fizeau : la source est collimatée à la taille de l’optique à tester. Le flux passe par un cube séparateur qui renvoie la moitié du flux sur l’échantillon à mesurer, et l’autre moitié sur la référence. Sur le chemin du retour à travers le cube, les deux flux vont suivre le même chemin et vont interférer. Comme pour le Fizeau, la nécessité de disposer d’éléments optiques de grande qualité demeure : plan de référence, cube et optique de collimation (ou montage afocal).

Le design peut être adapté pour mesurer presque tout type d’optique comme par exemple des objectifs transmissifs :

 

Il faut noter que l’on évite de traverser un cube séparateur avec un flux convergent car ceci introduit une aberration sphérique. Remplacer le cube par une lame séparatrice limite cette aberration sphérique mais introduit en plus de l’astigmatisme. Il faut donc collimater les flux avant de traverser le séparateur.

Le principe du Michelson a été détourné de son application première (mesure de la vitesse de la lumière et caractérisation de l’ether) pour les tests de métrologie optique par Green et Twymann en 1916 et 1919. La modification concerne essentiellement la source avec l’utilisation d’une source monochromatique pour un meilleur contraste des franges d’interférence.

Il est une notion qu’il est important de connaître en interférométrie, c’est celle de la longueur de cohérence. La distance sur laquelle deux flux lumineux issus de la même source peuvent interférer dépend de la longueur de cohérence de cette source. Une source émet des trains d’onde successifs et non pas une seule onde parfaitement stable. La lumière issue de deux trains d’onde différents pourra difficilement interférer car chaque train d’onde à une longueur d’onde propre. Plus la source est cohérente temporellement (donc strictement monochromatique) et plus les trains d’onde seront longs.  En interférométrie, cette notion est très importante car elle détermine la différence de marche maximale que l’on pourra avoir entre deux bras d’un interféromètre. C’est pour cette raison que les lasers – qui présente une longueur de cohérence importante de quelques cms à quelques kms – sont des sources privilégiées. Néanmoins l’interféromètre en lumière blanche est également très utilisée en microscopie.

D’autres variantes existent comme le Mach Zehnder qui ne fait passer la lumière qu’une fois à travers l’optique mesurée :

 

Pour tous ces interféromètres – Fizeau, Michelson et Twymann Green, Mach Zehnder – la précision des optiques et des références est critique car c’est elle qui fera la précision de la mesure. Plus les optiques testées sont grandes et plus les optiques associées le seront.

D’où l’idée qu’a eu Karl Ludwig Bath dans les années 70 d’utiliser comme référence une petite partie de l’optique à tester qui est considérée comme étant de bonne qualité à cette échelle. De plus cet interféromètre est dit à trajet commun : le deux bras passent par les mêmes éléments optiques. Ceci a deux avantages : d’une part les défauts des optiques traversées (lentille, cube séparateur) s’annulent puisque qu’ils sont présents dans les deux faisceaux, et d’autre part les déformations du front d’onde dues à la turbulence et aux vibrations s’annulent aussi partiellement. Ce design est donc plus robuste que les classiques Fizeau et Michelson.

Le design du Bath est dérivé du Michelson et est très adapté à la mesure des miroirs convergents comme ceux utilisés en astronomie.

 

Le faisceau collimaté de la source passe à travers un cube séparateur qui va générer le faisceau de mesure et le faisceau de référence.

Le faisceau de mesure est divergé par une lentille convergente pour couvrir la surface du miroir testé. Le faisceau de référence est dirigé vers le miroir via un miroir de renvoi à 90°.

Au retour les faisceaux suivent un chemin inversé : le faisceau de mesure va sur le miroir de renvoi à 90°, et le faisceau de référence passe lui par la lentille convergente.

Ce croisement des chemins permet au test d’être insensible à la qualité du miroir de renvoi, du cube séparateur, notamment à l’aberration sphérique qu’il introduit, et à la qualité de la lentille convergente.

En conséquence les composants qui permettent la construction de l’interféromètre de bath sont petits et peu couteux, ce qui le rend très accessible aux amateurs.

Il faut néanmoins prendre en compte quelques limitations liées à cet interféromètre :

  • – Le faisceau de référence est désaxé, et comme il frappe le miroir hors axe, il introduit un astigmatisme qui dépend de la taille du miroir et du rapport F/D selon l’expression (16R3λ) / D2d2 ou d est la distance entre les deux faisceaux, D le diamètre de l’optique testée, R rayon de courbure et λ la longueur d’onde de la source.
  • – Les miroirs paraboliques présenteront une aberration sphérique – ne fonctionnant pas en conjugaison infini/foyer mais au centre de courbure – aberration qui pourra être compensée par le logiciel d’analyse. Mais ceci est commun à tous les tests faits au rayon de courbure d’un miroir asphérique.

 

L’interféromètre de Bath peut aussi tester des objectifs transmissifs mais au prix de l’utilisation d’un couteux plan de référence pour un test en double passe.

Voici un exemple de réalisation d’un interféromètre de Bath et des réglages mécaniques qu’il demande :

 

Pour plus de détails, vous pouvez lire l’article de Charles Rydel qui présente des tests faits avec cet équipement.

Avantages de l’interféromètre de Bath

  • – Peu sensible à la précision des optiques utilisées
  • – simplicité d’alignement
  • – bonne précision, possibilité de décalage de phase (Phaseshift)
  • – peu sensible à la turbulence et aux vibrations
  • – peut utiliser des sources monochromes ou continues
  • – peut mesurer des miroirs convergents de grande taille ou des optiques transmissives avec un plan de référence
  • – coût et difficulté de réalisation faible
  • – peu sensible à l’opérateur.

Inconvénients

  • – Astigmatisme induit sensible au F/D et au diamètre
  • – ne permet pas l’alignement en temps réel
  • – difficulté de compenser l’aberration sphérique due au rayon de courbure par une lentille de Ross
  • – mise en œuvre longue